Nichée à la pointe du Cap-Ferrat, entre Nice et Monaco, la Villa Ephrussi de Rothschild et son domaine de sept hectares fascinent les visiteurs depuis près de 80 ans. Un des atouts de ce joyau de la Riviera : son écrin naturel, composé de neuf jardins aussi riches qu’hétérogènes. Explications de Bruno Henri-Rousseau, son directeur.

« Sublimer » la nature avec un modèle de gestion rationnel

Contrairement au musée, qui est une « invitation à dialoguer avec le passé », le jardin est un « lieu de vie, en perpétuel changement. » Une nature, « que l’Homme a su dompter », commente Bruno Henri-Rousseau. Pour maîtriser cet Eden (l’étymologie du mot jardin est « paradis »), le sublimer et faire de lui un « lieu de bonheur » pour les visiteurs, un entretien vétilleux est de rigueur : huit jardiniers permanents et deux apprentis sont à pied d’œuvre tout au long de l’année. « 400 000 € annuels sont consacrés à la main d’œuvre », détaille le directeur. En complément de ces charges fixes s’ajoutent les charges variables comme l’achat de nouvelles plantes, « jusqu’à 30 000 € pour certaines », ou encore la gestion du réseau d’eau et les travaux de maçonnerie pouvant aller jusqu’à 200 000 €. Cette enveloppe globale d’environ 600 000 € de frais de gestion du jardin, impose à la Villa Ephrussi de Rothschild une « gestion rationnelle » de ce budget.

Le secret pour y parvenir ? Avoir un chef jardinier qui soit un « vrai manager », en mesure de « motiver ses troupes. » Sous sa supervision, les binômes se répartissent sur les différents jardins et se chargent de les entretenir toute l’année. L’hiver, les binômes se changent en quatuors pour mener à bien les plus gros travaux. « La nature est généreuse dans ses fruits, à condition que le jardinier le soit également dans le temps et l’énergie qu’il lui consacre. » Face au vent, à la pluie, au froid et aux plus grosses chaleurs d’été, les mains vertes continuent leur œuvre. Pour les soutenir, Bruno Henri-Rousseau recommande de se montrer concerné par les problématiques de leur métier et de ne surtout pas hésiter à descendre braver le climat avec eux. « Les directeurs d’institutions doivent être exigeants, mais cela ne doit jamais exclure la compassion. »

Un des atouts de la Villa pour faire resplendir l’héritage laissé par la Baronne ? « Depuis quelques années nous avons fait le choix d’un traitement biologique des jardins », confie Bruno Henri-Rousseau. Purins d’ortie, engrais organiques, traitement des bassins à l’ozone, utilisation de biostimulants pour les buis, et traitement à l’huile de colza pour les orangers remplacent désormais les traitements chimiques. L’équipe de jardiniers compte également sur de nouvelles alliées pour lutter contre les pucerons de rosiers : les coccinelles. « Au-delà des contraintes qu’elle impose, cette méthode rend nos jardins plus verts, et les couleurs et parfums des fleurs plus puissants. » Les premières à en profiter : les quelques milliers d’abeilles, que le site accueille dans des ruches, afin d’aider à la pollinisation des jardins.

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Besoin d’évasion ? Bienvenue à la Villa Ephrussi de Rothschild

En 2017, 170 000 visiteurs sont venus à la Villa apprécier le travail minutieux des jardiniers et admirer les fleurs, arbres et arbustes qui composent le lieu. « Un héritage des premiers hivernants venus sur la Côte d’Azur, emportant avec eux les plantes qu’ils avaient rapportées de leurs voyages exotiques pour les faire s’épanouir dans le sud de la France. » Palmiers ou encore cactées côtoient désormais les oliviers qui composaient autrefois le paysage. Aujourd’hui encore, les visiteurs sont en quête d’exotisme. Attente comblée par la Villa, grâce à la diversité des neuf univers imaginés par Béatrice Ephrussi de Rothschild.

Pour promouvoir la beauté de ses espaces verts auprès des visiteurs, la Villa Ephrussi de Rothschild mise sur la Fête des roses, qui fédère chaque année « près de 6 000 visiteurs », venus célébrer l’arrivée du printemps. Au milieu des allées fleurissent les stands de pépiniéristes, d’exposants de roses ou encore d’animations pour enfants : ateliers de peintures, lecture de contes, composition des premiers bouquets… Le succès de la Fête des roses et des plantes est largement relayé sur les réseaux sociaux. Une stratégie gagnante, puisqu’elle permet de « communiquer de manière intense », et, par ricochet, d’attirer les visiteurs tout au long de l’année.

Pour enchanter toujours plus son public, la Villa Ephrussi de Rothschild compte ouvrir ses jardins de nuit, les lundis et mardis durant l’été 2018. « Le soir, toutes les odeurs des fleurs remontent, et des jeux de lumières éclairent les arbres. Un tout autre spectacle s’offre aux visiteurs. » Bruno Henri-Rousseau imagine déjà une ambiance poétique et proche du rêve.

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